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 Qualité de vie • Article

SEP: « Je ne pense jamais à ce que je ne peux plus faire »

Il y a près de huit ans, Koen, un directeur commercial passionné de 55 ans, a appris qu’il était atteint de la SEP. Il a décidé de ne pas mettre sa vie en suspens, mais s’est employé à écrire sa nouvelle histoire. « Ça peut paraître étrange, mais en fait je me sens plus heureux maintenant qu’avant. »

C’est peu après le réveillon du Nouvel An 2014 que Koen se rend chez son médecin de famille pour un contrôle de routine. Il sort d’une période chargée au boulot et se sent un peu fatigué. Pas de quoi s’affoler… Mais qu’est-ce qui pourrait bien expliquer la raideur de ses doigts ? Le médecin prend immédiatement ses symptômes au sérieux. Le rendez-vous est pris chez le kinésithérapeute. Douze mois et quelques consultations plus tard, le diagnostic de la SEP est clairement posé.

Une réinitialisation positive

À cette époque, Koen avait déjà dû démissionner de son poste de directeur des ventes, un travail qu’il exerçait avec passion depuis l’âge de 20 ans. Il a la vente dans le sang. Il est sociable et aime rencontrer de nouvelles personnes. « J’ai parcouru de nombreux kilomètres en voiture pour me rendre chez des clients. Mais soudain, ça n’a plus été possible. Je devais m’arrêter après avoir conduit une heure. J’étais épuisé. » Au travail, personne ne se doutait de rien. Koen a fait un burn-out. « On m’a donc dit de rester chez moi, de me reposer, que tout redeviendrait bientôt comme avant. Mais il n’en a pas été ainsi… »

Dans les mois qui suivent l’apparition des symptômes, tout va très vite pour Koen. Il est de plus en plus fatigué, présente des douleurs aux jambes et aux bras. Il a de plus en plus de mal à marcher. Au bout d’un certain temps, le quadragénaire n’a d’autre choix que d’arrêter de travailler. C’est un grand changement pour lui qui a toujours été très actif. Mais Koen refuse de se laisser abattre par les pensées négatives. « Je suis vraiment d’un naturel optimiste. »

« Je suis convaincu qu’en pensant positivement. On peut réellement améliorer la situation. On crée ainsi son propre bien-être. Et c’est un fait certain : on ne se sent pas plus heureux en rampant sur son canapé, en se laissant aller à larmoyer, en se demandant constamment : pourquoi moi ? Pourquoi ça m’arrive à moi ? En tout cas, je ne suis pas comme ça. Je suis plutôt de nature à aller de l’avant. »

De nouvelles occupations

Dès qu’il prend conscience qu’il ne pourra plus travailler, Koen tourne la page.

« D’accord, c’est donc ainsi que se dessine mon avenir », s’est-il dit à l’époque, avec sa femme et sa fille. « Je serai dorénavant en permanence à la maison. Eh bien dans ce cas, je serai homme au foyer. Je ferai donc mon possible pour garder la maison en ordre. » Depuis, il a trouvé son rythme. « Nous avons renoncé à notre femme de ménage. Peut-être qu’il me faut deux jours pour réaliser des tâches qui ne lui demandaient qu’une demi-journée. Mais je fais en sorte que cela ne m’atteigne pas. J’essaie simplement de me rendre utile à ma famille et d’en tirer le plus de plaisir possible. »

Koen trouve un nouvel élan dans ses activités quotidiennes. Il dit éprouver une réelle satisfaction à pouvoir rendre sa femme et sa fille heureuses avec un bon dîner, une maison qui sent bon ou le linge repassé et bien rangé dans l’armoire. « Je vois maintenant le repassage comme un agréable moment de détente dans ma journée. Je débranche mon cerveau, je me prends à rêvasser et à laisser vagabonder mon imagination, je mets de la musique en fond sonore, et finalement, presque sans m’en rendre compte, le repassage est déjà terminé (rires)

« Cuisiner me procure désormais aussi beaucoup de plaisir. Avant, je cuisinais rarement. En fait, je n’aimais pas vraiment ça. Mais maintenant, je vais faire mes courses en pédalant (le vélo me réussit toujours très bien), quand j’en ai envie. J’achète des légumes frais, je cherche une bonne recette et je commence à cuisiner. Et je dois dire que je m’amuse bien parmi mes casseroles (rires). »

Rendre ma femme et ma fille heureuses avec un bon dîner ou une maison qui sent bon me procure une réelle satisfaction.

Toujours en mouvement

Pour Koen, rester assis, au sens propre comme au figuré, n’a jamais été une option. Physiquement, sa situation est restée assez stable ces dernières années. Cela, Koen le doit en partie aux médicaments, mais il est également convaincu que son attitude positive a un effet bénéfique sur sa condition physique. Ne serait-ce que parce qu’il se motive sans relâche à faire des choses et à continuer à avancer. « Je me rends pratiquement tous les jours à vélo à la boulangerie, au supermarché ou chez le kinésithérapeute. Il y a quelques années, je me suis également affilié à un club de tennis de table près d’ici. Je fais ainsi d’une pierre deux coups : cela me permet de pratiquer un sport pour lequel je suis encore physiquement à la hauteur, mais aussi de rencontrer d’autres personnes. »

Il s’est également fait des amis lorsqu’il a emménagé dans une nouvelle maison adaptée, il y a un an et demi. « Dans notre précédente maison, j’avais réalisé beaucoup de rénovations moi-même. Je n’ai pas su en faire autant cette fois-ci. C’était, quelque part, un peu frustrant… Mais je me suis alors attelé à la coordination des travaux. Tout s’est déroulé sans le moindre problème et il y a de quoi être fier du résultat. »

La maison se trouve dans un tout nouveau lotissement, raconte Koen. « J’avais encore un peu de temps libre, j’ai donc pris l’initiative de créer un comité de quartier (rires), ce qui nous a déjà permis d’organiser de chouettes activités. Et je passe ainsi très régulièrement du temps avec d’autres personnes. »

La SEP en toute décontraction

En participant à toutes sortes d’activités, Koen soigne également son mental. C’est dans cet esprit qu’il a également créé son propre blog il y a trois ans (www.komalo.be). « J’ai toujours aimé écrire. Un texte, un poème, une lettre d’amour à ma femme (rires). J’ai donc pensé : et si je créais un site web pour partager mes expériences de vie avec la SEP ? Cela me permet non seulement de travailler ma concentration et ma mémoire, mais aussi de contribuer à ouvrir davantage la discussion autour de la SEP. Car je constate que cette maladie reste parfois incomprise. »

Dans sa famille, Koen n’a jamais fait de la maladie un sujet tabou. Mais pour ce qui est du monde extérieur, ce n’est pas quelque chose que l’on crie sur les toits, admet-il en toute franchise. « On ne met pas ce genre de message sur Facebook : “Bonjour à tous, j’ai la sclérose en plaques, s’il vous plaît, ayez pitié de moi” — parce que c’est la dernière chose que l’on souhaite. Mais les voisins et les connaissances remarquent que vous n’allez plus au travail, que vous semblez soudainement être tout le temps à la maison, alors qu’à première vue, il ne semble pas y avoir de problème. Puis viennent les questions. Au bout d’un moment, j’ai dit à ma femme : “il faut que je le dise”. Et c’est ce qui m’a motivé à commencer mon blog. »

« Pour mon premier post, j’ai écrit un poème. Pour résumer : j’ai la SEP, mais ça ne m’empêche pas de prendre la vie avec décontraction. Les réactions que j’ai reçues m’ont vraiment fait chaud au cœur (il s’interrompt un instant). Je ressens encore une certaine émotion quand j’en parle. »

De petites choses

Au fil du temps, Koen constate que son blog apporte également du soutien à de nombreuses personnes. « Je reçois beaucoup de messages du genre : “Merci pour tout ce que vous faites, vos textes me donnent du courage” ou “je comprends maintenant ce que ma belle-mère doit ressentir, car elle ne veut ou ne parvient pas à me parler elle-même de sa maladie”. »

Ça le touche, Koen doit bien l’admettre. « Je me rends compte que je peux encore être utile aux autres. Qui plus est en faisant ce que j’aime, c’est-à-dire écrire. Et il y a bien entendu des jours plus difficiles que d’autres, la SEP m’a définitivement privé de certaines choses. Mais heureusement, les beaux moments sont encore très majoritaires. »

Koen évoque d’ailleurs la question qui lui est le plus souvent posée : « Qu’est-ce que tu ne peux plus faire à cause de ta maladie ? » Ce à quoi il répond : « Je ne m’arrête pas à ça. Je pourrais, bien sûr, énumérer d’emblée un certain nombre de choses. Mais à quoi bon se lamenter à ce sujet ? Je pense qu’il est préférable de me concentrer sur ce qu’il m’est encore possible de faire. Je passe, par exemple, désormais beaucoup plus de moments de qualité avec ma femme que lorsque je travaillais encore du matin au soir. Et je partage aussi davantage de moments chaleureux avec ma fille. »

« Je découvre également des choses dont je n’avais pas conscience auparavant. Quand il fait beau, il m’arrive d’aller m’asseoir une demi-heure dans la forêt, un peu plus loin. Et d’écouter les sons qui en émanent. Cela me rend toujours particulièrement heureux. Pourtant, c’est quelque chose que je n’aurais jamais fait avant la SEP. »

Un homme satisfait

« Si vous m’aviez demandé, il y a huit ans, comment je voyais mon avenir, j’aurais brossé un tableau très différent », admet Koen. « Je n’aurais jamais imaginé une telle existence pour moi. Mais quand je me regarde dans le miroir aujourd’hui, je vois un homme satisfait. Cela peut paraître étrange. Mais je suis encore plus heureux maintenant qu’auparavant. J’ai encore tellement de choses à apprécier. »